Abû Yazîd Tayfûr Bistâmi – L’ivresse spirituelle

Né en 804 à Bastâm Iran

Mort en 874 à Bastâm, Iran

Tous les hommes sont plongés dans la mer de l’insouciance; applique-toi à ne pas te laisser submerger dans les flots de cette mer.

– Bistâmî

 

Celui que Dieu aime est généreux comme la mer, bon comme le soleil, humble comme la terre.

– Bistâmî

Bibliographie

› ‘ATTÂR Farid-ud-Dîn, Le mémorial des saints, traduit par A. Pavet de Courteille, Editions du Seuil, 1976

› DERMENGHEM Emile, Vies des saints musulmans, Actes Sud, 2005

› RINGGENBERG Patrick, Guide culturel de l’Iran, Teheran, Rowzaneh, 2017

Fondateur de la confrérie Bistamiyya

Bâyazid Bistâmi, dont les ancêtres étaient zoroastriens, est né en 804 à Bastâm, une ville située entre Teheran et Mashad. Il fait partie des premiers grands mystiques soufis persans. Bistâmî, aussi connu sous le nom de Bâyazid, a vécu de nombreuses années comme derviche en pratiquant l’ascèse de façon très rigoureuse. Il a passé beaucoup de temps en retraite (khalwa) dans sa petite cellule de méditation.

 

Dans son ouvrage le « mémorial des saints » Attar relate le récit de l’ascension mystique (miraj) décrite par Bâyazid Bistâmi. Ce dernier va parvenir à un degré très élevé et vivre des états d’ivresse spirituelle où ses paroles prononcées en état de transe sont parfois à tel point incomprises des théologiens qu’il doit quitter la ville à plusieurs reprises. Passionné de Dieu, il déclare : « J'ai bu l'amour coupe après coupe. Le vin n'a pas manqué et je ne suis pas désaltéré. » Mais on le rappelle à chaque fois car des  calamités et des épidémies surviennent en son absence et on finit par le vénérer en s’habituant à ses propros excentriques.

 

La ville de Bastâm abrite sa dernière demeure, située dans la cour extérieure d’une mosquée très ancienne, construite au 7-8e siècle, puis reconstruite en 1120-21 et dont le magnifique Mihrab (niche qui indique la Qibla) date de 1299. La tombe, une dalle de marbre très modeste, porte l’inscription Sultan al-Arifin, le Sultan des Connaissants. Après la mort du maître, le site devient un lieu de pèlerinage. La mosquée abrite le sanctuaire de l’Imâmzâdeh Mohammed (descendant d’un des douze imams chiites). Les confréries d’Asie centrale s’appuyent sur l’héritage de Bistâmi qui fait partie des maîtres de la Naqshbandiyya.

— Catherine Touaibi

 
Récit de voyage

19 avril 2019. Notre guide et notre chauffeur iraniens n’ont jamais entendu parler du grand Bistâmi. Pourtant il fait partie de leur histoire. Intrigués par l’intérêt pour Bistâmi de deux femmes venues d’Occident, ils décident de retarder leur retour vers Teheran et nous accompagnent, mon amie Setty et moi. Le responsable des lieux, M. Rezvan, prend le temps de nous expliquer l’histoire millénaire de Bastâm en nous offrant une visite guidée du complexe qui est d’une richesse insoupçonnable. C’est un trésor du patrimoine.

 

L’architecture de la mosquée est impressionnante. Elle date du 12ème siècle. A la fin de la visite, il nous ouvre les portes fermées à clé de la cellule de retraite de Bistâmi. L’endroit n’est habituellement pas ouvert au public. Il y a d’abord un petit hall d’entrée, puis la minuscule cellule de méditation. Je suis touchée par la qualité du lieu, pure et intense. C’est un instant d’élévation, hors du temps, en silence.

 

A la fin de la journée, notre guide et notre chauffeur sont rayonnants et nous disent combien ils ont apprécié découvrir ce joyau de leur héritage spirituel. Il faut parfois une personne de l’extérieur pour raviver la mémoire.

– Catherine Touaibi